Le ludomanagement : donner la place au jeu en entreprise

Matteco-Ludomanagement

Après 20 ans au sein du Département RH de Décathlon en Belgique, Marc Rysenaer a fondé Mattéco en 2021.  Passionné par l’intelligence collective, Marc est un spécialiste des nouvelles pratiques de gestion, incluant les principes de l’entreprise libérée. Aujourd’hui coach en transformation managériale, il crée avec Mattéco des espaces qui favorisent la collaboration et aident les entrepreneur∙e∙s à devenir de meilleur∙e∙s gestionnaires. Dans son éventail d’outils, il favorise le jeu et le ludomanagement pour libérer la créativité et l’énergie des entrepreneur∙e∙s et de leurs équipes. Son leitmotiv : « Co-créer, co-décider, co-développer ».

Qu’est-ce que le ludomanagement?

Le ludomanagement est une méthode de gestion collaborative et interactive qui permet d’atteindre des objectifs de groupe en entreprise en énergisant les collaborateur∙trice∙s et en donnant libre court à leur créativité. Le jeu est le déclencheur pour se libérer des biais cognitifs inconscients. Enfant, nous avons une facilité naturelle à expérimenter et à faire des associations d’idées parfois farfelues, mais très créatives. Ce naturel se perd en grandissant, alors qu’on adopte les codes et les réflexes de la vie en société et tandis que le cerveau se spécialise. Le jeu permet de reconnecter les professionnel∙le∙s à cet imaginaire : il favorise les échanges entre les deux hémisphères du cerveau. Le jeu court-circuite les schémas mentaux et ouvre à la sérendipité.

« Quand on est dans le jeu, on s’enlève des freins en retrouvant sa spontanéité.»

Passer du jeu à l’enjeu

Selon Marc, nombreux sont les jeux qu’on peut utiliser en entreprise. On choisit en fonction de l’objectif à atteindre et des besoins des participant∙e∙s. Il existe des jeux spécifiques dédiés à l’animation en entreprise, tels que les Lego Serious Play, Beurktionnary, les Method KIT, Discube…Ils portent souvent le nom de Serious Game. Mais de nombreux jeux de société peuvent également être facilement détournés pour enrichir les animations: Story Cube, cartes DIXIT, Dobble… Cela sera au choix de l’animateur.

Ludomanagement - Sélection non-exhaustive de serious games (jeu en entreprise) - Mattéco
Sélection non-exhaustive de serious games.

L’essentiel est de garder en tête que le jeu ne doit pas infantiliser. Il prend toute sa place quand il est au service d’un objectif, que ce soit par exemple, la connexion des participant∙e∙s au sein d’un groupe, l’appropriation du sujet de la réunion ou encore une séance de créativité. Le jeu n’est donc pas une finalité mais un moyen. Le jeu permet de sortir des sentiers battus et d’aborder des problématiques sous un angle nouveau.

Pour être créatif∙ve et atteindre des objectifs communs, il faut d’abord laisser la place à l’individu. On alloue ainsi de l’espace à des idées qui ne sont pas forcément alignées avec celles des gestionnaires ou du ou de la chef∙fe d’entreprise. Et c’est ok! affirme Marc. C’est le processus qu’il suit dans ses interventions. Chacun∙e se fait sa propre représentation, sans se laisser influencer par celle des autres. La métaphore visuelle, la verbalisation et le reflet de l’autre permettent ensuite de clarifier sa pensée et de construire un modèle partagé pour y faire face. Puis, la cocréation se fait dans la mise en commun.

Le jeu permet d’utiliser la métaphore et le symbolisme pour mieux communiquer des concepts parfois complexes ou mal identifiés : on peut décrire les relations au sein d’une équipe, définir la vision partagée, les valeurs de l’entreprise… Le jeu devient un moyen de gagner en efficacité et en créativité en entreprise. On travaille en jouant.

Jouons collectif!

Les rencontres d’équipe sont essentielles pour le bon fonctionnement des organisations. Elles demandent donc une attention et une préparation particulière. Mattéco œuvre aussi bien au sein d’organismes à but non lucratif que de groupes privés, dans des petites comme dans de plus grandes structures. Les constats y sont souvent les mêmes : on termine souvent les rencontres épuisé∙e, sans avoir des réponses claires ou le sentiment de s’être rapproché∙e∙ d’un objectif commun. On a plus souvent le sentiment d’avoir perdu un temps précieux malgré le fait que tous sont conscient∙e∙s qu’elles représentent des investissements importants en temps et en ressources humaines et financières.

L’objectif est que les équipes puissent se libérer des rencontres d’équipe que l’on continue à faire seulement parce qu’on les a toujours faites ou parce qu’on n’a pas d’alternative viable. Les chef∙fe∙s d’entreprise ne sont pas toujours des animateur∙trice∙s naturel∙le∙s et c’est normal. Leur mandat est principalement dans la vision et dans la gestion.

Le rôle du leader

Dans une entreprise plus collaborative, le chef∙fe d’entreprise, et ses gestionnaires, doivent pouvoir donner l’autorisation au groupe de trouver des solutions et de les mettre en action . On doit faire le deuil du ou de la chef∙fe d’entreprise qui apporte toutes les solutions, qui sait toujours ce qui est le mieux pour son entreprise et son équipe. Il faut lâcher prise sur l’idée que les décisions nous appartiennent exclusivement. L’entrepreneur∙e-chef∙fe ne doit pas influencer ou manipuler le processus. Il ou elle doit avoir confiance dans le potentiel de l’équipe. Faire appel à un∙e consultant∙e externe neutralise le processus : cette personne s’assure qu’avant de commencer à « jouer », on a une vision claire sur un objectif identifié, des valeurs partagées et un cadre (le carré de sable!) bien défini. Certains chef∙fe∙s d’entreprise font même le choix de ne pas participer et attendent de connaître la conclusion atteinte par le groupe pour intervenir. Selon Marc, l’idéal est d’accompagner le ou la leader en individuel, puis de travailler avec les équipes.

Ludomanagement - Sélection non-exhaustive de serious games (jeu en entreprise) - Mattéco

Les 4 fonctions des rendez-vous collectifs

Faire appel à un∙e consultant∙e externe permet de se recentrer sur les 4 objectifs que devrait viser toute rencontre d’équipe :

  1. Opérationnel :  on répond à une problématique ponctuelle ou organisationnelle, à un enjeu clients qui demande une mobilisation des ressources humaines, budgétaires ou de temps. 
  1. Formation : on lance un nouvel outil ou un nouveau programme et on veut s’assurer que toute l’équipe est au courant et impliquée. 
  1. Régulation : on crée des liens avec son équipe. On favorise les interactions et la collaboration pour éviter des relations de travail énergivores. 
  1. Stratégique : on construit et/ou on communique la vision de l’entreprise.

Le jeu a sa place pour répondre à chacun de ces objectifs, mais il est important de l’intégrer au bon moment, et de dépasser l’apriori que le jeu « c’est pour les enfants ».  Le consultant∙e en ludomanagement aide à créer un plan d’animation annuel, à identifier les objectifs des rencontres (et à s’y tenir) et à distinguer les moments de rencontre non-négociables de ceux qui devraient plutôt être optionnels pour motiver les collaborateur∙trice∙s à y participer pleinement de façon volontaire.  En annonçant son plan à l’avance (généralement sur un an), on s’assure que les collaborateur∙trices restent pleinement impliqué∙e∙s dans les rencontres.

Une image contenant texte, personne, intérieur, plafond

Description générée automatiquement

Le déroulé de l’intervention par le jeu

Marc nous expose un exemple concret de comment il intègre le jeu à des rencontres de clubs EntreChefs PME en Belgique.

  1. Chaque participant∙e choisit parmi plusieurs personnages, celui qui correspond le mieux à comment il ou elle se sent au moment d’animer une réunion. Pourquoi ? 
  1. Tour à tour, on répond à plusieurs questions :  « Quel est mon meilleur souvenir de réunion ? », « Et donc une réunion efficace pour moi c’est… », « Je suis satisfait∙e quand… », etc.  
  1. Chacun∙e note ses idées ou des mots clés puis modélise son personnage dans un univers qui représente LA difficulté rencontrée dans la tenue de ses réunions d’équipe. Grâce aux legos, on rend cette problématique visuelle et on est capable de placer une brique rouge sur l’élément qui nous impacte le plus.  
  1. Il ou elle place alors symboliquement son personnage face à sa problématique. La métaphore permet de mieux organiser sa pensée et de la communiquer plus aisément.

L’exercice donne aussi l’occasion de prendre connaissance et conscience des problématiques de ses collaborateur∙trice∙s dans un contexte énergisant. L’animateur∙trice est le gardien du fil rouge de la rencontre dans l’atteinte des livrables révélés par le groupe.

Avec le ludomanagement, le jeu devient l’outil idéal pour créer de bons moments collectifs, énergisants et productifs avec son équipe.

Le bonheur d’entreprendre