Selon une étude menée par KPMG, 75 % des femmes dirigeantes ont déjà vécu le syndrome de l’imposteur au cours de leur carrière. Et Noémie Caron, repreneure de Caron et Fils, en fait partie. Lors de notre entrevue, elle en a parlé sans détour, avec une franchise qui donne immédiatement le ton.
« Des fois, je me questionne… est-ce que je suis la bonne personne ? » nous a-t-elle confié.
La reprise de cette PME a été bien plus qu’un simple transfert de responsabilités. Elle s’inscrit dans une histoire de continuité familiale, portée par une transition douce et un apprentissage autant intérieur que sur le terrain. Assumer un nouveau rôle, rassurer les équipes, préserver l’héritage tout en y apportant peu à peu sa propre touche… autant d’étapes qui ont jalonné le parcours que Noémie nous partage dans cet article.
C’est dans le cadre de l’initiative des Clubs de repreneur·e·s, dédiée à la phase post-acquisition, que nous avons rencontré Noémie afin de comprendre comment elle a vécu cette transition et comment elle continue, chaque jour, d’incarner la relève.
Une vocation inattendue
Issue du domaine de la santé et de l’activité physique, Noémie n’aurait jamais cru devenir cheffe d’entreprise. Pourtant, un événement anodin a tout déclenché : la démission de l’adjointe administrative de l’entreprise familiale.
« J’étais entre deux emplois… et l’adjointe administrative venait de donner sa démission. J’ai commencé comme adjointe. »
Un rôle qu’elle croyait temporaire, mais qui est devenu rapidement un tournant.
« Ça coulait dans mes veines depuis que j’étais petite. J’ai vu mes parents être propriétaires… et finalement, ça venait de soi que je reprenne l’entreprise. »
Un processus exigeant et transformateur
Elle se souvient encore du moment où elle a signé les papiers de la reprise. Un geste qui marquait le début d’une nouvelle étape et d’un apprentissage à venir.
« Le processus pour devenir propriétaire, c’est un travail d’envergure… beaucoup de réflexion, de planification et de discussions parfois difficiles », a-t-elle confié.
Pour traverser cette transition, Noémie a choisi d’avancer avec humilité.
« J’ai pris le temps d’apprendre auprès des cédants. On a eu une transition douce, planifiée à l’avance, avec transparence auprès des employés », a-t-elle- souligné.
Une façon de faire qui lui a permis de s’installer progressivement dans son rôle, sans brusquer l’équipe ni l’identité de l’entreprise.
Préserver l’ADN de l’entreprise tout en la faisant évoluer

Passer du statut d’employée à celui de propriétaire n’a pas été quelque chose d’automatique. Il a fallu rassurer l’équipe, maintenir la stabilité et éviter les chocs culturels.
« On voulait que ça se passe sans vague… que malgré toute cette période de changement, le reste continue comme avant », a-t-elle expliqué.
Avec sa sœur et son cousin, également repreneur·e·s, ils ont choisi ensemble une approche prudente :
« On veut garder notre recette qui fonctionne, tout en y mettant tranquillement notre couleur. »
Composer avec le syndrome de l’imposteur
Assumer son rôle n’a pas été immédiat pour Noémie. Même après la signature des papiers, il lui a fallu du temps pour intégrer pleinement cette nouvelle identité. Ce rôle se construit peu à peu, à travers les interactions avec les partenaires financiers, les employé.e.s et la communauté d’affaires.
« Même si on le vit tous les jours, c’est au moment de l’expliquer aux autres qu’on le réalise vraiment », a-t-elle dit.
Noémie évoque aussi le courage nécessaire pour surmonter le syndrome de l’imposteur.
« Parfois, je me demande si je suis la bonne personne… Mais plus le temps passe, plus ça devient naturel », a-t-elle confié.
Ce doute n’est pas isolé. Selon un article publié par Forbes, 54 % des femmes en poste de leadership ressentent régulièrement ce syndrome, contre seulement 24 % des hommes. Cette même source souligne que 36 % des dirigeant·e·s ressentent fréquemment ce sentiment, au point où il peut freiner leur progression.
Elle insiste sur l’importance de célébrer ses réussites et de reconnaître ses efforts, même dans les moments de doute.
Son conseil aux repreneur·e·s : « Tout n’a pas besoin d’être répondu tout de suite. Prends une respiration…les réponses rapides ne sont pas toujours les bonnes ».
Les clubs d’EntreChefs PME : un lieu sans jugement pour dire les vraies choses
Noémie a rejoint EntreChefs PME avant la transaction, ce qui lui a permis de vivre toute la période de reprise avec un soutien précieux.
« Ça m’a donné l’espace où tout a droit d’être dit… sans masque, sans convaincre personne. »
Elle décrit son club comme un lieu d’introspection et de partage. « Je peux me poser des questions sur comment je me sens par rapport à une situation… et mon groupe m’aide à voir ce que j’aurais dans mon angle mort », a-t-elle expliqué. Son groupe lui a offert des perspectives qu’elle n’aurait jamais envisagées seule :
« Juste d’avoir des gens avec des expériences différentes… ça change tout. »
Pour elle, la force du réseau réside dans la diversité des parcours : « Peu importe la taille ou le secteur, on vit les mêmes émotions et les mêmes enjeux… et d’avoir quelqu’un qui l’a déjà vécu, ça aide à traverser l’épreuve » a-t-elle partagé lors de l’entrevue.
En conclusion de notre échange, elle a souligné : « En communauté, on est plus fort. On prend du volume en ayant plus de connaissances et d’options pour agir. » Son histoire illustre que le repreneuriat n’est pas une course, mais un chemin où la réflexion, l’entraide et la résilience font toute la différence.
Vous êtes sur le point de finaliser une acquisition, ou vous venez tout juste de le faire et souhaitez échanger avec d’autres entrepreneur·e·s ? Rejoignez nos clubs dédiés aux repreneur·e·s en phase post-acquisition.